Les éditos du Curé

La ( fameuse ) parabole des talents

On la connaît bien, cette parabole. Peut-être trop bien ? Du coup, on y est habitué. Prenons le temps de la relire et de remarquer peut-être quelques détails oubliés. Par exemple, que Dieu fait preuve de justice, et non d’égalitarisme. Tout le monde n’a pas reçu la même chose, il suffit d’ouvrir les yeux pour s’en rendre compte. Mais Dieu est juste : il attend de nous uniquement ce que nous pouvons donner. Voilà de quoi nous encourager… et lui faire confiance. Pourquoi avoir peur ? Et que dire de cette réponse du Maître : « Serviteur bon et fidèle, tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton maître ! » N’aimerions-nous pas l’entendre à notre tour au soir de notre vie ? Ne vient-elle pas « canoniser » nos vies toutes simples, faites de petites fidélités, bien souvent cachées : devoir d’état, services à la maison, études, engagements en paroisse, écoute et tendresse pour le conjoint, prière du soir, soin des enfants… On pourrait aussi méditer sur le thème de la paresse : c’est ce que reproche le Maître au troisième serviteur. Elle apparaît comme une injustice et un gâchis. Les talents que Dieu nous a donnés auraient pu porter du fruit. Mais la paresse a rendu stériles les dons de Dieu. C’est aussi un manque de charité : car lorsque Dieu donne, c’est pour qu’on puisse mieux servir ceux qui nous sont confiés. Demandons la grâce de découvrir les talents que Dieu nous a donnés, et de mettre notre cœur à les faire fructifier « pour la gloire de Dieu et le salut du monde ».

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Vous êtes le Temple de Dieu !

Voici un passage étonnant de l’évangile : Jésus, bien loin de l’image qu’on peut parfois s’en faire, utilise la force pour jeter les marchands hors du temple. Et il ne semble pas manier le fouet si mal !

Qu’est-ce qui provoque ainsi la (sainte) colère du Fils de Dieu ?

Bien sûr, c’est la profanation du Temple : on a fait de la demeure de Dieu un lieu de trafic. Encore aujourd’hui, nos églises sont la cible de dégradations, souvent en haine de ce Dieu qu’elles abritent. A nous d’imposer le respect, en premier lieu par notre attitude de recueillement dans nos églises. Les bavardages ou les causeries avant, pendant ou après la messe n’y ont pas leur place, le parvis est fait pour cela ! Que nos gestes, nos attitudes, notre tenue manifestent un réel esprit de prière, et non une convenance sociale.

Mais Saint Paul nous aide à aller plus loin, à la suite du Christ qui évoquait déjà son propre corps comme le vrai temple… « N’oubliez pas que vous êtes le temple de Dieu » dit-il aux Corinthiens ! Les profanations sont tout aussi graves et douloureuses quand elles atteignent ce temple-là. Quand la dignité de la personne humaine n’est pas reconnue ou respectée, quand le corps ou le cœur de l’autre est abîmé ou utilisé tel un objet, c’est l’œuvre de Dieu qui est profanée. « Le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c’est vous ».

Père Pierre-Hervé Grosjean +

La famille, par-delà la mort

Deux événements marquent ces jours-ci : la fin de la première session du Synode sur la Famille, et les fêtes de Toussaint et du 2 novembre, jour de prière pour les défunts.

Cette famille que le Synode veut promouvoir et servir est un don de Dieu. Ce don demeure par-delà la mort. Les liens d’amour que nous avons créés sur la terre ne sont pas supprimés mais transformés par-delà la mort. Nos frères du Paradis et ceux encore dans ce temps de purification du Purgatoire nous sont profondément unis, en particulier à chaque messe et dans la prière. Le Père Sertillanges, dans un beau texte, évoquait cette nouvelle communion : « Par la mort, la famille ne se détruit pas, elle se transforme, une part d’elle va dans l’invisible. On croit que la mort est une absence, quand elle est une présence discrète (…) Plus il y a d’êtres qui ont quitté le foyer, plus les survivants ont d’attaches célestes. Le ciel n’est plus alors uniquement peuplé d’anges, de saints connus ou inconnus et du Dieu mystérieux. Il devient familier, c’est la maison de famille, la maison en son étage supérieur, si je puis dire et du haut en bas, le souvenir, les secours, les appels se répondent. »

Quelle joie et quelle consolation de savoir que des retrouvailles nous attendent, qu’un jour nos familles seront réunies au Ciel, près de Jésus. Purifiées de toute blessure et division, elles connaîtront la paix et la joie de partager ensemble le Bonheur de voir Dieu.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Le festin des noces est prêt…

 

Voici un maître, un père de famille, qui célèbre les noces de son fils. N’est-ce pas Dieu Lui-même, nous invitant au « festin des noces de l’Agneau ». Son Fils Jésus est venu « faire alliance » avec nous. La fiancée infidèle, il est venu l’épouser après l’avoir réconciliée et purifiée. Notre âme, Il s’est donné pour elle… « ceci est mon corps livré pour toi, ceci est mon sang versé pour toi… ». Ce festin célèbre ce grand mystère du Fils de Dieu qui se donne, et ne veut faire plus qu’un avec nous.

 

Ces noces, ce festin, le Bon Dieu aimerait que tous y participent. Comme il est grand ce désir de Dieu ! Il ne se laisse pas décourager par les premiers refus. Il insiste. Il a d’abord insisté pour le peuple hébreu… si peu ont écouté l’appel. L’invitation a été alors lancée au monde entier. Mais les cœurs sont tièdes. L’indifférence est blessante, surtout chez ceux qui devraient être les premiers à comprendre… Le Maître insiste. Toute notre histoire est là : Dieu veut nous faire entrer dans son amitié, nous faire participer à ces noces, et se heurte si souvent à notre peur, notre tiédeur… ou notre agenda trop rempli ! Parce que nous sommes centrés sur notre propre désir, bien souvent fluctuant. Nous ne comprenons pas ce désir ardent de Dieu, nous ne l’entendons pas !

 

Ce n’est pas rien d’être « invité au repas du Seigneur, au festin des noces de l’Agneau » comme le dit la liturgie. Heureux es-tu si tu en prends conscience. Et prends cela au sérieux, prépare-toi ! Montre au Maître non pas que tu es « digne », mais que tu as compris son désir. Que ta joie est d’y répondre. Et que cela fonde désormais ta vie.

 

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Qu’as-tu fait de ce que tu as reçu ?

Il faut voir un vigneron prendre soin de sa vigne. Il ne compte pas ses heures de travail, il soupèse les grappes de raisin, espérant une belle récolte, s’enthousiasmant déjà du bon vin qu’il en fera… Depuis trois dimanches, Jésus utilise cette image pour nous enseigner. Le peuple de Dieu est la vigne dont le Seigneur prend soin. Il se désole quand elle donne de mauvais fruits. Ou encore, comme la semaine dernière, Jésus parle de nous comme les vignerons que le Maître de la vigne envoie au travail. Il nous a confié une vigne : l’Eglise, l’Evangile, le Salut… pour que nous en prenions soin. Aujourd’hui, il évoque ceux qui ont voulu se l’approprier, jusqu’à tuer le fils du Maître de la vigne…

Qu’as-tu fait de cette vigne que tu as reçue ?

C’est à la fois ta vie, ta liberté, tes talents, ta famille, ta capacité d’aimer… Tous les trésors que Dieu a mis en toi en te créant. Qu’en fais-tu ? La tentation d’oublier que tout cela t’a été donné et confié pour servir est grande. On se met vite à la place du Maître…

C’est aussi ta foi, encore un don de Dieu. Qu’en fais-tu ? Porte t’elle de beaux fruits ? La travailles-tu ? Et ta vocation dans ce monde ?

C’est l’Eglise, qui t’est aussi confiée, à toi baptisé. Ta famille spirituelle. Tes frères et sœurs dans la foi. Comment la sers-tu, cette vigne, pour qu’elle apporte le Salut à tous ? Comment t’impliques-tu dans ta paroisse, cette petite portion de l’Eglise Universelle ? Tu en es aussi responsable. Dans l’Eglise, nul n’est simplement « consommateur ».  Tous sont appelés à travailler à la vigne, chacun avec ce qu’il est.

C’est enfin ce monde, et plus précisément le bien de ce monde, c’est-à-dire le Bien commun. L’engagement désintéressé pour défendre et promouvoir les fondements de ce bien commun, de la dignité de tous. N’oublie pas cette vigne-là… même si le travail y est souvent difficile.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

La Paroisse dans notre vie chrétienne.

A la lumière des lectures de ce jour, nous pourrions méditer sur le rôle de la paroisse dans notre vie chrétienne.

La paroisse est d’abord un lieu de conversion et de salut. J’y viens pour rencontrer Dieu, le servir et le recevoir. Pour cela, il me faudra aussi obtenir son pardon, et me laisser purifier. Ce n’est pas un hasard si tout près de l’entrée, il y a le confessionnal ! La miséricorde m’introduit auprès de Dieu.

La paroisse est un lieu où se recherche et se vit l’unité. Le catholique doit faire cette double expérience : découvrir qu’il a sa place dans l’Eglise, tel qu’il est. Découvrir en même temps qu’il n’est pas catholique tout seul, ou « à sa sauce », mais qu’il appartient à une famille plus large qu’est l’Eglise. De cette famille, il reçoit les mots pour dire la foi et pour prier. C’est à la paroisse, dans la liturgie, qu’on fait cette double expérience, sous la responsabilité du curé. On apprend à aimer l’Eglise telle qu’elle est, en vivant une réelle unité dans la diversité.

La paroisse enfin est un lieu d’exercice de la charité. Les paroissiens sont des frères dans la foi que Dieu me donne à aimer, à servir, à porter. Nous sommes invités à nous encourager mutuellement, dans les joies comme dans les peines, sans jamais désespérer de tel ou tel. Notre paroisse n’abandonnera jamais l’un des siens.  Même les paroissiens défunts demeurent dans notre prière, dimanche après dimanche… l’esprit de famille perdure, par delà la mort.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Bienheureux ouvrier de la dernière heure !

Notre sens de la justice sociale ne peut qu’être ébranlé par l’évangile
du jour. Pour que l’ordre et la paix règnent, il faut que tous soient traités de façon juste. Or cette idée saugrenue du Maître de rétribuer autant l’ouvrier de la dernière heure que celui qui a peiné toute la journée ne semble pas aller dans ce sens, et ressemble même à une provocation.

Qu’est-ce qui nous choque ? Qu’il ait trop ? Ou que le premier n’ait pas assez, même s’il a ce qui était convenu ? Pourquoi la bienveillance généreuse du Maître nous choque-t-elle ? Elle nous semble même dangereuse, tant elle risque de remettre en cause les règles et contrats établis, la coutume … Pourquoi avoir du mal à se réjouir du bonheur de l’autre, alors que j’ai ce qu’il me faut pourtant ?

Mais posons-nous une autre question : pourquoi instinctivement nous mettons-nous du côté de l’ouvrier de la première heure ? Ne serions-nous pas plutôt celui que le Maître a attendu longtemps, celui dont Il a espéré longtemps un amour véritable et fort ? Celui qui a mis du temps – toute une vie peut-être – pour croire et aimer, servir et se donner, à la hauteur des attentes du Seigneur ? Et dans ce cas, cette miséricorde du Maître, si nous nous en découvrons les premiers bénéficiaires… nous choque-t-elle encore vraiment ?!!

Père Pierre-Hervé Grosjean +

La Croix et la Gloire

Il n’y a que la foi chrétienne pour oser rapprocher ces termes. L’instrument de torture est devenu l’instrument de la victoire sur le mal. Le jour de tristesse et d’effroi – terrible vendredi saint – a vu s’ouvrir les portes du Paradis. La mort est devenue l’entrée dans la Vie.

Nous vivons cette expérience à notre tour, si nous acceptons de suivre Jésus. C’est quand nous nous reconnaissons pécheurs que nous sommes relevés. C’est quand nous acceptons de nous donner que nous trouvons la joie. C’est quand nous nous mettons à genoux devant les plus petits pour les servir, ou devant Dieu pour le prier, que nous sommes grands. C’est quand nous nous laissons humblement aider que nous sommes forts… On pourrait continuer ainsi la litanie de toutes nos petites ou grandes croix, de nos petites ou grandes morts, de nos petits ou grands abaissements et offrandes de nous-mêmes, consentis plus ou moins joyeusement, parfois douloureusement. Nous y découvrons à chaque fois une fécondité mystérieuse mais réelle, quand tout cela est vécu avec Jésus, à la lumière de sa croix désormais glorieuse.

La croix reste la croix. Nos épreuves sont de vraies épreuves. La gloire de la croix ne relativise pas la croix, ne la diminue pas. Elle nous en rappelle simplement la fécondité, et la Victoire à laquelle elle est pour toujours liée.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Etre saint au boulot ?

En ces jours de rentrée, il n’est pas inutile de méditer à nouveau sur notre « devoir d’état ». L’expression n’est peut-être pas très motivante, mais ce qu’elle veut dire l’est beaucoup plus !
Saint Josémaría expliquait : « la sainteté, c’est faire ce que je dois, et être à ce que je fais ». Nous ne plaisons pas à Dieu seulement quand nous prions ou quand nous sommes à l’église. Nous faisons la joie de Dieu quand nous faisons ce qu’Il attend de nous dans l’heure qui vient. Travail, études, détente, temps entre amis, services à la maison, prière, sport, œuvres de charité… au fond qu’importe ! Tout peut plaire à Dieu, si nous faisons ce que nous avons à faire, et si nous nous donnons vraiment dans ce que nous faisons. Etre là où Dieu nous attend – à notre bureau, à la maison, à l’église… –  mais y être vraiment, en faisant de notre mieux. La fidélité au « devoir d’état » est le chemin le plus simple, le plus quotidien pour être un saint ! Ainsi même les tâches les plus ordinaires ont du prix aux yeux de Dieu, si elles sont accomplies par fidélité, c’est-à-dire au fond par amour.  Bonne rentrée !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Une fidélité qui nous interpelle.

Nos frères chrétiens d’Irak ont été au cœur de l’actualité cet été, en particulier grâce au voyage effectué sur place par le Cardinal Barbarin. Depuis leur situation s’est dramatiquement aggravée, mais désormais plus personne n’ignore le drame qui se joue là-bas. Nous n’oublions pas non plus nos frères de Corée du Nord, de Chine, d’Egypte, du Nigéria, des pays du Golfe Persique… persécutés derrière un mur de silence.

Que cela peut-il nous inspirer, au seuil de cette rentrée scolaire ?

Bien sûr, nous savons l’importance de la prière. Nous croyons que nos prières peuvent les porter. Nous savons aussi leurs besoins matériels, pour ceux qui sont sur les routes de l’exode. Mais allons plus loin…

Le Cardinal Barbarin disait son émotion de voir que pas un seul chrétien de Mossoul n’avait renié sa foi. Pas un seul n’avait accepté de se convertir pour sauver ses biens, face à l’ultimatum imposé par les djihadistes. Leur fidélité nous impressionne. Elle doit aussi nourrir, entraîner, provoquer la nôtre, et nous aider à reprendre conscience de la grâce qui nous est faite de pouvoir vivre notre foi librement. Choisissons du coup de ne pas la vivre à moitié cette année. Ce sera la plus belle consolation à offrir à tous nos martyrs : « votre sacrifice n’a pas été vain. Il a porté du fruit, en réveillant l’occident attiédi, en éveillant nos cœurs endormis »

Pour eux, entrons avec courage et ferveur dans cette nouvelle année scolaire, en choisissant de vivre avec générosité nos engagements et notre vie spirituelle. Bonne reprise !

Père Pierre-Hervé Grosjean +