Les éditos du Curé

« Le monde les a pris en haine »

Jésus, au soir du Jeudi Saint, parle une dernière fois avec ses apôtres réunis autour de lui. L’ambiance est grave et l’émotion est grande. Il leur transmet son testament, que Saint Jean rapporte fidèlement dans les chapitres 14 à 17 de son évangile. Des pages à méditer sans se lasser. Au cœur de cet échange, le Christ s’interrompt et rentre en prière. A voix haute, il se met à parler à son Père et prie pour ses disciples et pour tous ceux qui viendront après eux. Jésus a prié pour nous au seuil de sa Passion.

C’est dans le contexte de cette prière qu’il a ces mots, parlant de ses fidèles : « Le monde les a pris en haine ». Ce sont des mots qui peuvent nous choquer. Pour Saint Jean, ce « monde » n’est pas la création voulue par Dieu, ni même les hommes, créatures de Dieu, mais un certain esprit du monde, une certaine culture ou mode de vie opposé à Dieu. Un monde qui se voudrait sans Dieu, révolté contre son Créateur ; « une culture de mort » disait Jean-Paul II. Les chrétiens au cœur de la vie de ce monde sont les témoins de l’existence de Dieu. Ils rappellent au monde qu’il ne s’est fait pas tout seul. Ils rappellent à tous notre état de créature. C’est insupportable à entendre, quand on veut « être comme des dieux » selon la promesse du Démon.

Voilà pourquoi le chrétien sera toujours un signe de contradiction pour le monde, en raison du message qu’il porte, rempart précieux contre le désir de toute puissance. Jésus ne veut pas que les chrétiens se retirent du monde, mais les y envoie au contraire, car ce témoignage est un service offert à tous. Tout en nous assurant que nous ne sommes pas seuls: « Courage, j’ai vaincu le monde »…

Père Pierre-Hervé Grosjean +

« Il n’y a pas de plus grand amour… »

… que de donner sa vie pour ceux qu’on aime » explique Jésus à ses apôtres, au soir du Jeudi Saint, comme pour leur donner la clé de compréhension des évènements dramatiques qui vont se dérouler dans les heures qui suivront. Toute la passion du Christ est un immense acte d’amour. C’est cet amour, au cœur même de la souffrance, et non la souffrance par elle-même, qui nous sauve.

Cela éclaire aussi le sens de toute vie donnée à la suite du Christ. Un père, une mère sait combien sa vie ne lui appartient plus vraiment. En se mariant, en accueillant des enfants, on choisit de ne pas vivre sa vie pour soi. On la donne. Il en est de même pour tous ceux qui – malgré leur célibat non choisi ou leur solitude – mettent leur vie « au service », en prenant soin des autres. Enfin, c’est le secret du bonheur des consacrés. La vocation religieuse ou sacerdotale n’est pas un renoncement à aimer, mais bien une autre façon d’aimer pleinement. Le cœur d’un prêtre, d’une religieuse, d’un moine n’est pas « verrouillé ». Il est donné. Au Seigneur Jésus, de façon unique et particulière. Aux autres, de façon pleine et entière. C’est l’amour qui fait entrer au monastère ou au séminaire. C’est par amour, et non par sacrifice, qu’on dit « oui ». C’est l’amour qui porte et donne du sens aux renoncements. De la sorte, ils ne sont pas vécus comme des frustrations. Nous sommes tous faits pour aimer, d’une façon ou d’une autre. Nul ne doit y renoncer. Notre vie sera belle si elle est donnée.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

« A vous d’en être les témoins ! »

Ce sont par ces mots que Jésus conclut son apparition à ses disciples, après les avoir aidés à relire ces trois années passées ensemble, à la lumière de la Résurrection. Il nous fait comprendre ainsi notre place dans le plan du Salut : Jésus a donné sa vie pour nous sauver, il a obtenu ce salut offert à tous. Il a réalisé – et lui seul pouvait le faire – notre rédemption. Mais il nous laisse maintenant le soin d’en faire profiter le plus grand nombre.

Etre témoins de cet amour de Dieu pour le monde, et de son salut offert à tous, ne veut pas dire être parfait, mais déjà plus simplement commencer par se laisser sauver ! Nous ne sommes pas meilleurs que ceux qui ne connaissent pas Dieu, mais nous nous savons aimés et pardonnés. A nous de laisser la grâce agir dans notre vie, et de montrer ainsi ce qu’elle pourrait faire dans la vie de chacun. C’est en cela que nous pouvons être « exemplaires » : à travers nous, donner au monde des exemples de pécheurs pardonnés et sauvés !

C’est au fond une belle raison de notre persévérance dans la foi : même et surtout à travers nos relèvements, nous sommes témoins de la puissance de la Résurrection et de la victoire de Jésus sur le mal. Ayons à cœur simplement d’en être des témoins explicites… et joyeux !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Saint Thomas et la promesse.

Etait-il vexé de ne pas avoir été présent, quand Jésus était apparu aux apôtres ? Avait-il été tant ébranlé par les évènements de la Passion, qu’il ne pouvait accepter cette bonne nouvelle ? Toujours est-il que Thomas refuse catégoriquement de croire le témoignage de ses compagnons. Incapable de se réjouir et de s’ouvrir à cette bonne nouvelle, il s’enferme dans son refus et sa tristesse. Il est déçu : déçu de lui, qui n’a pas été à la hauteur, on ne l’a pas vu au pied de la croix. Déçu de Jésus peut-être ? Il pensait suivre le Messie, le Sauveur, et celui-ci a terminé sur cette croix, comme un criminel… Déçu après avoir beaucoup espéré, mais sans doute en se trompant de fondements pour cette espérance.

Jésus se montre bienveillant et patient avec Thomas. Il revient, et lui offre le privilège d’une nouvelle apparition. Mais l’important n’est pas là. L’essentiel est la promesse que Jésus a faite à cette occasion : « Bienheureux ceux qui croient sans avoir vu ». Jésus pense à nous. Il sait qu’il sera souvent difficile de croire. Notre foi sera souvent éprouvée par les évènements, les tentations ou le doute. Jésus proclame dès maintenant « bienheureux » – c’est-à-dire leur ouvre les portes du Ciel – ceux qui choisiront envers et contre tout de lui faire confiance, et d’accueillir le témoignage des apôtres, transmis par l’Eglise. Que ce temps de Pâques nous donne de re-choisir de croire… notre joie en dépend !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Victoire !

C’est un cri de victoire qui retentit en cette nuit de Pâques ! Une immense clameur de joie et d’espérance… Jésus est ressuscité. Ce n’est pas juste un constat, une remarque, un fait ou un détail. C’est une vérité qui change tout. D’abord cela veut dire que Jésus est donc vraiment ce qu’Il affirmait être : le Fils de Dieu. Donc étant Dieu, tout ce qu’Il a pu nous dire et que les évangiles nous rapportent, est vrai. Dieu s’est bien révélé, Il a montré son vrai visage. Nous savons maintenant qui est Dieu. Nous connaissons le projet de Dieu pour nous. Nous avons découvert notre vocation. Nous avons vu à quel point Dieu nous aime. La Résurrection du Christ nous assure aussi de cette victoire définitive de Dieu sur le mal, notre péché, nos épreuves et même notre mort. Le Christ sort vainqueur de cet affrontement terrible, et nous sauve en nous assurant un matin de Pâques. La Résurrection nous rend certains de cette victoire, qui sera manifestée à tous, de façon éclatante, lors du retour du Christ. Mais cette Résurrection nous appelle aussi à nous engager : il a fallu des témoins de cette résurrection pour l’annoncer au monde. Il faut aujourd’hui encore des chrétiens qui s’engagent, servent, se donnent et témoignent pour que cette victoire du Christ puisse se réaliser en tous, servir à tous, être accueillie par tous. Elle n’impose rien, elle rend possible ce Bonheur éternel. Que tous puissent le connaître, voilà ce qui doit animer notre désir de témoignage ces jours-ci. Belle fête de Pâques à tous !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Jusqu’au bout

Nous voici entrés dans la « grande semaine », ces jours saints pendant lesquels toute l’Eglise revit, presque heure par heure, la Passion du Christ et sa Résurrection. Profitons de ne pas être en période de vacances scolaires pour nous rendre aux différentes célébrations, et les vivre tous ensemble. La liturgie de la semaine sainte est belle, profonde, impressionnante. Du lavement des pieds à la vénération de la croix, en passant par le feu pascal, les rameaux ou le chemin de croix, les gestes, les paroles, les processions nous enseignent : c’est une véritable catéchèse.

Dans quel état d’esprit vivre ces jours saints ? Il est trop tard pour se lamenter sur ses résolutions non tenues ou son carême raté, passé trop vite. Au moins, nous aurons compris que nous sommes des pauvres qui avons besoin d’être sauvés. C’est ainsi qu’il faut suivre Jésus, l’accompagner jusqu’au bout. La liturgie réactualise les évènements qu’elle nous fait célébrer. Nous sommes bien il y a 2000 ans, à Jérusalem. Jésus se donne à nouveau pour nous. Nous voulons vivre ces jours avec lui, tout proches de lui, pour le consoler, le remercier, l’aimer et nous laisser aimer. Ainsi, le mystère pascal de sa mort et de sa résurrection pourra faire son œuvre dans nos vies.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Les leçons du 25 mars

Deuxième pause dans le carême, à quelques jours de son issue : la fête de l’Annonciation, ce mercredi 25 mars. Que d’enseignements à tirer de cet événement ! On ne finira jamais de le méditer.

Ainsi, regardons combien cet événement inouï, qui va bouleverser la face du monde – Dieu s’incarne, Dieu vient parmi nous, Dieu se fait l’un de nous – se déroule dans le secret et le silence d’une petite chambre de Nazareth !  Si nous savions ainsi tout ce que Dieu fait encore en ce moment dans le secret des cœurs, nous serions moins découragés sur l’état du monde. Autre enseignement : le « oui » de Marie. Dieu a voulu en avoir besoin. L’amour de Dieu a besoin de l’engagement de notre liberté pour sauver ce monde. Et encore : nous sommes touchés de voir l’enfant Jésus dans la crèche. Mais imaginons-le dans le sein de Marie. Embryon divin, qui déjà réjouira Elisabeth, et Jean-Baptiste en elle. Cette partie de notre existence – si cachée et si précieuse – Dieu l’a aussi vécue. La vie sur terre de Jésus commence là, le 25 mars. Pas le 25 décembre. Encore aujourd’hui, Jésus n’agit pas seulement quand Il est visible aux yeux des hommes. Caché derrière les apparences du pain et du vin, demeurant en nous quand nous L’avons reçu, nous Le portons à notre tour pour vivre avec Lui et Le donner au monde ! Depuis ce 25 mars, Jésus est là, présent. « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps ».

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Saint Joseph, veillez sur nous.

Le 19 mars, le carême va s’interrompre une première fois, le temps de célébrer la fête de Saint Joseph. Ce grand saint, époux de la Vierge et père adoptif de l’Enfant Jésus, aura bientôt sa statue dans notre église, grâce à votre générosité. Je voudrais qu’il ait aussi sa place dans notre prière.

Saint Joseph nous est proche : humble créature comme nous, marqué par le péché comme nous, sauvé par la Miséricorde de Dieu comme nous, il n’a pas dû être toujours évident pour lui d’accueillir le projet de Dieu, si bousculant. Il a dû lui falloir beaucoup d’humilité pour recevoir sa place dans l’histoire du Salut, auprès de l’Immaculée et de l’Enfant-Dieu. Il fut tout à leur service, offrant sa force, sa sagesse et son courage pour les protéger et veiller eux. A son contact, Jésus apprit le noble travail du bois et les traditions d’Israël. Saint Joseph fut un saint silencieux, s’effaçant devant ceux qui lui étaient confiés. Sa joie fut d’accomplir sa mission et de préparer Jésus à la sienne : en tout, il fut le « serviteur » par excellence. Qu’avec son aide, nous mettions notre joie à accomplir fidèlement ce que Dieu attend de nous. Qu’il puisse veiller sur nos familles, comme il a veillé sur l’Enfant et sa Mère, nous aidant dans les joies comme dans les peines, à choisir la confiance.

Père Pierre-Hervé Grosjean +

Période de scrutins…

Alors que notre pays va connaître à nouveau un temps d’élections                  – occasion de vous rappeler le devoir grave que fait l’Eglise à chaque baptisé adulte de voter – la paroisse, elle, va vivre une autre forme de scrutins… Les catéchumènes qui se préparent au baptême vont en vivre trois, qui seront célébrés ces prochains dimanches de carême. Il en est ainsi dans toute l’Eglise.

Il s’agit à chaque fois de manifester ce discernement (on « scrute ») qui s’opère pour chaque futur baptisé entre le bien et le mal. Il lui faut renoncer au mal, à ce qui conduit au mal, et choisir le Christ. On s’y reprend à trois reprises, car tout effort de conversion a besoin d’être renouvelé. La communauté prie pour les catéchumènes, et le prêtre fait une prière d’exorcisme – c’est à dire de délivrance – sur eux. Le combat spirituel nécessite l’aide de nos frères dans la foi et la grâce de Dieu pour être gagné.

C’est l’occasion pour nous tous d’entrer avec nos frères et sœurs catéchumènes dans un effort de conversion renouvelé. Comme ils le découvriront à leur tour, même si nous sommes devenus enfants de Dieu, même si nous avons choisi le Christ, notre fidélité n’est jamais acquise une fois pour toutes. Le choix de Dieu est à reposer sans cesse.  Il nous faut le refaire profondément, généreusement, joyeusement avant Pâques ! Bonne suite de carême !

Père Pierre-Hervé Grosjean +

La compassion plutôt que l’exclusion.

A l’époque de Jésus, les lépreux étaient exclus de la communauté, selon la loi que rappelle la première lecture. On peut le comprendre : il n’y avait pas d’autre façon de contenir l’épidémie. En acceptant d’entrer en contact avec un lépreux, en manifestant de la compassion pour lui, Jésus pose un geste qui n’est pas anodin. Il va même purifier ce lépreux et lui permettre ainsi de retrouver une vie sociale.

Au-delà de la guérison physique, on peut voir dans cet épisode l’image de la miséricorde de Jésus à l’œuvre avec nous, si souvent marqués de la lèpre du péché. Celle-ci nous exclut de la joie d’une amitié vivante avec Dieu, non parce qu’Il nous repousserait, mais parce que nous nous éloignons. Jésus n’a de cesse de revenir vers nous. Notre péché le peine, mais surtout provoque sa compassion. Il n’aime pas nous voir ainsi. Il nous montre que nous ne sommes pas trop loin pour lui. Personne ne doit s’imaginer exclu de l’amour de Dieu. Cette compassion de Jésus doit provoquer dans notre cœur le même désir exprimé par ce lépreux de l’évangile : « si tu le veux, tu peux me purifier ! ». C’est au fond toute la démarche du Carême qui commence ces jours-ci : prendre conscience de nos fautes, faire l’expérience de la compassion du Seigneur, demander pardon, vivre la guérison de notre cœur. Nous en avons tous besoin !

Père Pierre-Hervé Grosjean +