Les éditos du Curé

Ces quelques jours d’enneigement nous ont donné de vivre une expérience particulière : celle de la vulnérabilité. La première région de la 5ème puissance mondiale qu’est notre pays se retrouve paralysée par 10 cm de neige.  Je ne veux pas relativiser les vraies difficultés que cela a pu occasionner à certains. Je mesure simplement pour vous comme pour moi combien nous ne sommes pas habitués à faire face à l’imprévu, à ne pas tout maîtriser, à ne pas tout décider. Nous restons vulnérables. Est-ce une mauvaise nouvelle ? Pas forcément. Cette vulnérabilité nous a forcés à nous entraider. Elle nous oblige à savoir lâcher prise, à consentir à ne pas pouvoir tout réaliser. Nous avons besoin des uns et des autres. L’expérience de la fragilité nous ouvre à l’autre.

Cette question est au cœur des débats autour des révisions des lois de bioéthique. La tentation est forte de vouloir dépasser toutes les limites imposées par la nature, jusque dans les mystères mêmes de la vie comme de la mort. L’homme parfait, un monde parfait, serait-ce vraiment une bonne nouvelle ? Y aurions-nous encore notre place ? Un monde sans fragilités ni limites ? Cette tentation de toute puissance est forte. Elle n’est pas sans rappeler la séduction du démon dans le livre de la Genèse : « si vous prenez de ce fruit, vous serez comme des dieux ! » Consentir à ses limites, à sa vulnérabilité, revient au fond à consentir à son état de créature ne pouvant se passer de son Créateur. Mais c’est aussi se découvrir aimé tel qu’on est, y compris dans sa fragilité. C’est aussi se découvrir invité à aimer son prochain qui a besoin de nous comme nous avons besoin de lui. Bienheureuse fragilité qui nous relie les uns aux autres et nous appelle au service !

Père Pierre-Hervé GROSJEAN+

Edito du 11 février 2018

Voici une belle expression de Saint Paul, dans sa première lettre aux corinthiens : « Je me suis fait tout à tous pour en sauver à tout prix quelques-uns. » On sent à travers ces mots l’engagement total et entier de Paul pour aider Jésus à sauver les âmes, pour obtenir de ceux à qui il prêche l’évangile, un « oui » à Dieu qui pourra les sauver. « Malheur à moi si je n’annonçais pas l’évangile ! » écrit-il aussi. Il a vraiment compris et fait sien ce désir de Jésus que tous soient sauvés. Il est désormais animé de ce même désir, il en mesure l’enjeu et l’urgence, et cela mène sa vie, le mènera même à donner sa vie.

Nous sont révélés là le cœur d’un prêtre, le cœur d’un apôtre mais aussi d’une certaine façon ce que devrait être le cœur de tout baptisé, de tout confirmé. En cela, nous serons vraiment disciples de Jésus, que l’évangile nous montre arpenter sans relâche les routes de Galilée pour guérir, enseigner, bénir et pardonner. C’est le premier qui s’est fait « tout à tous ». Ses proches s’inquièteront d’ailleurs, effrayés de voir que « le Fils de l’homme n’a pas un endroit où reposer sa tête », ni même le temps. Les seuls moments de solitude sont consacrés à la prière.

Que cette charité ardente qui embrasait le cœur du Maître se retrouve dans celui des disciples que nous sommes. Cette charité nous presse ! Elle nous fait regarder le monde qui nous entoure comme attendant son sauveur. Elle nous révèle tant de cœurs blessés attendant l’annonce du pardon possible. Elle nous ouvre les yeux sur la soif d’espérance qui habite tant de nos contemporains. Pour nous aussi, annoncer l’évangile est une « nécessité qui s’impose » !

Père Pierre-Hervé GROSJEAN+

Edito du 4 février 2018

Il se trouve que j’ai la joie, au retour de ma retraite à Lourdes, de fêter ce WE mes 40 ans. Vous savez que je n’aime pas trop parler de moi. Pourtant, je voudrais tout simplement avec vous – puisqu’au fond vous êtes aussi ma famille – rendre grâce au Seigneur pour la vie qu’Il m’a donnée, et pour tout ce que j’ai reçu des personnes qui m’ont accompagné ou que j’ai pu rencontrer, servir ou écouter.

Un anniversaire est une belle occasion de relire sa vie. Il y a forcément des blessures, des erreurs, des échecs. Tout cela, il faut prendre le temps de le confier à la Miséricorde de Dieu. Elle n’efface pas le passé, mais nous en libère. On n’est pas prisonnier des péchés qui ont été pardonnés, il est précieux de le rappeler. Il y a aussi de multiples motifs d’action de grâce ! Il est tout aussi important de les nommer, de ne pas les oublier : « le Seigneur fit pour moi des merveilles ! » : chacun peut le chanter ! C’est ainsi qu’on redécouvre que notre vie est un don de Dieu, que toute vie est un don de Dieu. La miséricorde et l’action de grâce nous entraînent à la confiance pour les années qui viennent : Dieu continue de nous accompagner. Elles nous aident aussi à rechoisir de vivre pleinement la vie qui nous est donnée. Parfois on peut être tenté – surtout en milieu de vie – de rêver d’une autre vie, de comparer, ou de refaire l’histoire en imaginant ce qu’elle aurait pu être si on avait fait d’autres choix, etc. … Certains vont même jusqu’à tout lâcher – y compris leurs engagements ! – pour recommencer « une autre vie » ! Mais tout cela est de l’illusion. C’est notre vie à laquelle il faut consentir. C’est dans notre vie que nous sommes appelés à aimer, à servir, à nous donner de façon renouvelée. C’est là que Dieu nous attend, qu’Il veut nous combler et nous sauver.

La vie est belle, même cabossée. La vie de prêtre est belle, comme toute vie, quand elle est donnée ! Que le Seigneur nous garde chacun dans cette joie de nous donner !

Père Pierre-Hervé GROSJEAN+

Edito du 28.01.2018

Les textes de ce dimanche nous invitent à la conversion. Ils évoquent même l’urgence de nous convertir, car le « Règne de Dieu est tout proche »… C’est à la lumière de cette réalité que Jésus appelle ses premiers apôtres. « Je vous ferai pêcheurs d’hommes » !

On ne peut comprendre la vie consacrée sans comprendre la nécessité du Salut. C’est ce besoin d’être sauvé dont beaucoup de nos contemporains –  peut-être même d’entre nous – ont perdu la conscience. Dès lors le recours aux sacrements devient facultatif, en fonction de nos envies ou de ce que l’on « ressent ». L’idée de consacrer toute sa vie, de renoncer au mariage, pour « servir et sauver » perd de son sens et de son attractivité. La foi elle-même devient un habillage qui nous fait du bien, mais plus vraiment le moyen d’être sauvé. Pourquoi évangéliser, pourquoi essayer de convaincre nos amis, si nous pensons qu’ils n’ont pas besoin d’être sauvés, ou qu’ils le sont automatiquement s’ils sont « de bonnes personnes » ? Pourquoi finalement Jésus est-Il venu ? Pourquoi a-t-Il enduré tout cela ?  Il aurait pu se contenter d’être un sage, apportant un nouveau regard sur l’existence, une nouvelle façon de méditer, une nouvelle philosophie de vie… comme tant d’autres sages avant lui et après lui !

« Pêcheurs d’hommes » ! … Oui, il s’agit bien de ramener les hommes à Jésus, au moyen de cette barque qu’est l’Eglise, sous la direction de Pierre et de ses successeurs. Il y a là de quoi combler une vie entière. Cette mission est celle des prêtres, mais aussi celle de tous les baptisés. Amener à Jésus… « pour que tous soient sauvés ».

Père Pierre-Hervé GROSJEAN+

Edito du 21 janvier 2018

Il y a dans l’évangélisation comme dans notre propre progression spirituelle deux dimensions : celle de l’enseignement et celle de l’expérience. L’intelligence et le cœur. Les deux sont importants. L’intelligence a besoin de savoir et de comprendre. Il faut la nourrir. Jamais le Seigneur nous demandera de cesser de réfléchir. Nous avons cependant à reconnaître avec humilité que nous avons besoin de recevoir. On ne peut entrer dans le mystère de Dieu tout seul. Nous avons besoin de maîtres qui nous enseignent la doctrine et l’histoire du Salut, mais aussi de l’Esprit de Vérité, l’Esprit-Saint, capable de nous éclairer.
Savoir et comprendre ne suffisent pas. Il faut aussi faire l’expérience de l’Amour de Dieu. « Venez et voyez » dit Jésus à ceux qui le cherchent. S’approcher du Christ, même si on ne sait pas bien, va nous donner l’occasion de le découvrir. Il ne faut pas attendre d’être un parfait théologien pour venir adorer Jésus dans le Saint Sacrement ou se confesser ! Il n’est pas besoin d’être un savant accompli pour donner sa vie pour Dieu… Faire l’expérience de sa présence nous donnera inversement envie de mieux le connaître. Il faut aimer Dieu avec notre cœur ET notre intelligence. Il faut nourrir notre cœur et notre intelligence si nous voulons progresser dans notre foi. Il faut parler ET au cœur ET à l’intelligence de ceux qui nous entourent, si nous voulons leur transmettre la foi qui sauve. Et quand l’intelligence semble blessée ou bien obscurcie par les fausses idées, il faut alors passer par le cœur. En ce sens, aimer prépare bien souvent à pouvoir ensuite enseigner. Et enseigner sera une façon de continuer à aimer.
Père Pierre-Hervé GROSJEAN+
Edito du 14.01.2018

Avez-vous remarqué l’atmosphère si particulière de cette nuit de Noël ? Cette nuit n’est pas comme les autres. Cette nuit-là est pleine de contraste. Dehors, le froid et l’obscurité. Nos soucis et nos épreuves. Nos vies ne sont pas toujours simples ni faciles. L’ombre aussi de nos deuils récents ou plus anciens, plane encore : nos défunts nous manquent beaucoup ces jours-ci. L’inquiétude de la maladie, du chômage, de l’âge, les soucis pour nos enfants, pour nos parents… le poids de la solitude ou de la précarité pour certains. Dedans, au cœur de tout cela, au milieu de la nuit, un Enfant dans la clarté joyeuse et paisible d’une crèche. Quelques lumières, une mère rayonnante qui nous Le présente, un père qui contemple et protège. Cette crèche nous attire, quel que soit notre âge. On pressent que cette nuit-là, il faut être là, venir se recueillir pour comprendre le sens réel de cette fête de Noël. Le temps d’une messe, d’un moment devant la crèche, d’une prière en famille, tout est déposé devant l’Enfant. On comprend qu’Il peut porter tout cela, Il désire même qu’on puisse Lui confier nos joies et nos peines. Il entend la prière silencieuse de nos cœurs, Il voit au-delà des façades qu’on présente, Il comprend… Auprès de la crèche, même les cœurs les plus blasés peuvent se laisser toucher. Avec étonnement, on y retrouve un cœur d’enfant, capable de s’émerveiller devant ce Dieu qui se fait l’un de nous, si proche de chacun. Voilà le secret de Noël. Voilà cette lumière offerte dans nos ténèbres et devant laquelle ils ne peuvent que reculer. Voilà la joie promise : là, quand je prends le temps d’approcher cet Enfant qui m’invite et m’ouvre les bras, je me redécouvre aimé, pardonné et sauvé. Dieu est proche de moi, je ne suis pas seul, je suis aimé. Voilà le secret de cette paix qui ne demande qu’à m’envahir, de cette joie qui veut me combler, pour demain repartir sur le chemin escarpé de ma vie, en me sachant accompagné.

Saint et Joyeux Noël à chacun de vous !

Père Pierre-Hervé GROSJEAN, curé de la paroisse

Edito du 24 décembre 2017

Saint Paul apôtre écrit ces quelques mots aux chrétiens de Thessalonique. On pourrait trouver cela un peu facile, un peu « gentil »… si on oubliait que celui qui les écrit risque sa vie pour le Christ, va connaître la prison, parcourt les routes, affronte les dangers et les trahisons, et s’épuise à annoncer l’évangile.

Pourtant, au milieu de tout cela, Saint Paul persiste à rendre grâce et demeure dans la joie. D’où vient-elle, cette joie ? N’est-elle pas justement celle qu’on trouve au soir de Noël, en contemplant la crèche ? Au cœur des ténèbres, une lumière s’est allumée cette nuit-là. Et depuis, notre joie demeure. Quelles que soient les tempêtes et les tourmentes qui peuvent nous assaillir, nous savons que rien ne pourra effacer ce qui s’est passé à Noël : le Très-Haut s’est fait le tout proche. Dieu est venu jusqu’à nous. Jésus s’est fait l’un de nous. Cet événement change la face du monde et marque à tout jamais l’histoire des hommes, notre histoire. Toute notre espérance, toute notre joie, toute notre paix et notre force reposent sur cette vérité : Dieu est proche. Jésus est à mes côtés. Il est venu jusqu’à moi. Voilà pourquoi je peux être dans la joie, et rendre grâce en toutes circonstances, y compris les plus difficiles, y compris parfois au milieu des larmes. Je ne suis pas seul. Je ne suis plus jamais seul. Le Tout Puissant est venu partager ma vie. Le mal n’aura pas le dernier mot.

Abbé GROSJEAN+

Edito du 17 décembre 2017

L’Avent est le temps de l’attente. Nous avons souvent médité sur ce que nous attendons : la fête de Noël, qui vient comme « réactualiser » dans nos vies la venue du Sauveur ; le retour du Christ dans la Gloire ; sa visite aujourd’hui dans les sacrements. Mais peut-être oublions-nous parfois que nous ne sommes pas les seuls à attendre ! Dieu attend, Lui aussi… Saint Pierre écrit ainsi : « Le Seigneur ne tarde pas à tenir sa promesse, alors que certains prétendent qu’il a du retard. Au contraire, il prend patience envers vous, car il ne veut pas en laisser quelques-uns se perdre, mais il veut que tous parviennent à la conversion. »

Ce qui doit nous toucher, c’est aussi la patience de Dieu. Ce Dieu assez bon pour nous attendre, pour nous laisser le temps de revenir vers Lui, de faire le choix de l’accueillir. La patience de Dieu est le beau visage de sa miséricorde. « L’amour prend patience… » écrivait Saint Paul dans son hymne à la charité. Reprenons conscience de cela ! Chacun est attendu par Dieu, car Il veut tout faire pour que tous se laissent sauver. Il patiente après chacune de nos chutes, Il patiente en nous voyant douter, hésiter, parfois le délaisser. Il patiente en nous entendant récriminer. Il patiente au risque d’être accusé de ne pas tenir sa promesse… mais Il voudrait tellement obtenir le « oui », l’amour de chacun. Offrons-Lui cette joie pendant ce temps de l’Avent, puisque ce temps nous est offert une fois encore pour que « tous parviennent à la conversion ».

Abbé GROSJEAN+

Edito du 10 décembre 2017

A l’occasion de ce premier dimanche de l’Avent, plus de 200 d’entre nous sont en pèlerinage à Saint Etienne de Rouvray, sur les pas du Père Hamel.

On aurait pu penser que ce prêtre âgé avait « fait son job ». Il avait servi bien au-delà de l’âge règlementaire de la retraite. Il aurait pu prétendre au repos. Mais le Père Hamel avait voulu servir jusqu’au bout. Et c’est un matin, en semaine, en célébrant sa messe comme chaque matin dans cette petite église, avec 4 ou 5 paroissiens, que l’inattendu est arrivé. En quelques secondes, le Père Hamel a dû donner sa vie, en étant associé mystérieusement mais réellement à son Maître, Jésus crucifié, dont il venait de célébrer le sacrifice à l’autel.

On ne donne pas sa vie ainsi sans s’y être préparé. Sans avoir veillé. Sans être prêt. On est prêt à tout donner parce que jour après jour, on apprend à se donner dans l’ordinaire de notre vie. Parce qu’on se tient fidèle dans la prière. Parce qu’on est à sa place, persévérant et le cœur éveillé. Parce qu’on ne se lasse pas d’aimer.

Voilà ce qu’il nous faut demander et vivre pendant ce temps de l’Avent. La grâce d’être prêt. Prêt pour Noël. Prêt pour accueillir Jésus dans notre vie. Prêt pour Le suivre, dans l’ordinaire comme dans l’imprévu de cette vie.

Abbé GROSJEAN+

Edito du 3 décembre 2017

L’année liturgique s’achève avec cette fête solennelle du Christ-Roi, comme pour nous rappeler cet événement qui viendra mettre un terme à l’histoire de ce monde tel qu’il est : le retour dans la gloire de Jésus pour établir le règne de Dieu, pour que Dieu soit « tout en tous » comme le dit Saint-Paul.

Cela nous permet de rappeler quelques vérités, en particulier celle du jugement dernier qu’évoque l’évangile. Il a souvent été représenté dans les églises ou sur les façades de nos cathédrales. La miséricorde n’efface pas la justice. Et si sur cette terre, cette justice des hommes est loin d’être parfaite – certains y échappent même – nul ne pourra échapper au jugement de Dieu. Ceux qui ont vu en Jésus un Sauveur, le Bon Pasteur qu’ils ont essayé de suivre de tout leur cœur, l’Ami qu’ils ont essayé de servir dans les pauvres et les plus petits, verront en Lui un juge dont ils n’ont pas peur. Mais on ne peut imaginer que reste impuni et caché tout ce mal qui a scandalisé, atteint, blessé, humilié les plus petits, les plus fragiles. Les puissants de cette terre qui font le mal, en pensant bénéficier indéfiniment d’une totale impunité, devraient trembler ou se repentir à l’écoute de ces paroles de Jésus. De même que chacun de nous si nous pensions pouvoir vivre notre vie avec un cœur blasé, indifférent aux autres et donc à Dieu.

Cela veut aussi dire que Dieu reste le Maître de l’histoire. La vie de ce monde est entre ses mains. En remontant vers son Père, Jésus nous confie ce monde pour que nous puissions y poursuivre sa mission, jusqu’à son retour en gloire. Dieu semble se cacher parfois. Il respecte notre liberté. Mais aucun événement, aucun drame, aucun échec ou aucune victoire ne doit nous faire oublier qu’Il reste le Maître et qu’Il reviendra, quand « l’heure sera venue ». C’est aussi un motif de paix et de confiance : la victoire de Dieu est certaine, son règne vient…
A nous de préparer le monde à l’accueillir !

Abbé GROSJEAN+

Edito du 26 novembre 2017