
Un reliquaire magnifique
Le reliquaire de la Passion du Christ a été classé Monument Historique en 2015. À la fois objet patrimonial et religieux, il est source d’intérêt pour les passionnés d’histoire, et de vénération par les fidèles.
Au début du XVIIIe siècle, dans les ultimes années de sa vie, Louis XIV offre à Madame de Maintenon, sa deuxième épouse, dont l’union est restée secrète, trois reliques enfermées dans des bijoux. Ces reliques sont des fragments relatifs à la Passion du Christ. Madame de Maintenon, très pieuse, les porte régulièrement sur elle, cousues dans ses vêtements selon une dévotion courante à l’époque. Ainsi, elles l’accompagnent dans sa journée. À sa mort, la Maison Royale de Saint-Louis, pensionnat pour les jeunes filles de la noblesse désargentée (l’actuel Lycée militaire), fondée par Madame de Maintenon, conserve le reliquaire. Celui-ci est régulièrement exposé à la vénération des élèves, et c’est probablement à cette époque qu’il prend sa forme actuelle, dans son cadre sur pied en bois doré.
Lors de la suppression de la maison en 1793, plusieurs parmi les anciennes religieuses partent avec leurs effets personnels tant en soustrayant à la tourmente révolutionnaire le précieux reliquaire. Il est ensuite confié à l’abbé Alexandre Prat (1760-1829) par deux anciennes religieuses dont il était le confesseur, avant d’être transmis au curé de Saint Cyr et à ses successeurs. En 1944, pendant la Seconde Guerre Mondiale, quelques fidèles vigilants le mirent à l’abri lors des bombardements qui ont entraîné la destruction de l’église paroissiale.
En 2024, par volonté du Maire, Sonia Brau, et des habitants de la ville, le reliquaire, restauré, est installé définitivement dans l’église Sainte-Julitte.
Description des reliques
Le reliquaire en bois sculpté et doré encadre une plaque en argent ajouré qui contient trois reliques de la Passion enserrées chacune dans un bijou : un fragment de la Colonne de la flagellation (au centre), un fragment de la Vraie Croix (à gauche) ainsi qu’un fragment de la Tunique du Christ (à droite). Ces bijoux sont caractéristiques des XVIe et XVIIe siècles.
Chaque bijou est scellé d’un cachet de cire rouge appendu à un fil de soie rouge qui maintient fermé le reliquaire. Le cachet de cire atteste de l’authenticité des reliques certifiée par les autorités de l’Église catholique. Au XVIIe siècle, on portait ces bijoux-reliquaires cousus sur l’habit, il s’agissait d’un acte de dévotion privée. La logette contenant la relique était à l’origine disposée face interne lorsque le bijou était porté, ce qui explique que le bijou soit plus orné sur ce qui nous apparaît aujourd’hui comme le revers.
Est appelé relique dans le culte catholique ce qui reste d’une personne honorée comme un saint (éléments corporels, ou plus indirectement les objets lui ayant appartenu.). Le culte des reliques est attesté dès les premiers temps de l’Église, notamment dans le culte des martyrs en vue d’honorer leur mémoire et de prier avec eux dans la communion des saints. Le Christ étant monté au Ciel avec son corps, il ne nous reste que des reliques indirectes. Parmi les reliques, celles de la Passion, liées directement au Christ, sont les plus importantes. Offertes à la vénération des fidèles, les reliques s’effacent toutefois en importance devant la présence réelle de Dieu dans l’Eucharistie, seule digne d’adoration.
Le bijou central (France, XVIème siècle)
Il s’agit d’une colonne en or rehaussée de lettres en émail noir « DU PILLIER DUQUEL IESUS FUT BATU EN LA MAISON DE PILATE ». La colonne renferme un fragment de porphyre, relique de la Colonne de la Flagellation du Christ. La colonne vénérée à Jérusalem comme étant celle de la Flagellation est aussi en porphyre.
Le bijou romain orné d’une intaille (Rome, XVIIème siècle)
Ce reliquaire contient une relique de la Sainte Tunique. Le reliquaire remploie une intaille en onyx probablement plus ancienne, figurant la Pietà d’après celle de Michel-Ange dans la basilique Saint Pierre de Rome. L’intaille est insérée dans une monture en or avec un entourage alternant émeraudes et diamants taillés en table. Sur l’autre face, un cristal de roche renferme la relique, encadré de feuilles stylisées en or gravé et quatre attaches arrasées.
Le bijou parisien de style « cosses de pois » et camée (France, 1630-1640)
Le camée oblong en cornaline présente en léger relief l’Immaculée Conception. La monture en or présente une bordure en or émaillé en forme des fleurs stylisées avec des arcs ajourés dans le style « cosses de pois » alternant avec des feuilles stylisées serties de diamants en table. Le revers présente la même bordure en or émaillé sans sertissage de diamants autour de la plaque de cristal de roche qui laisse apparaître la relique, un fragment de la Vraie Croix. Le bijou est appendu à une bélière en or émaillé serti de diamants.
Ces trois bijoux-reliquaires sont plus anciens que la plaque en argent qui a été conçue pour les accueillir. Ils étaient destinés à la dévotion privée de leur propriétaire.
Le port des bijoux-reliquaires par les fidèles remonte au Haut Moyen-Age. A l’époque classique, à la suite du Concile de Trente, cette pratique rejetée des protestants est restée autorisée par l’Eglise catholique. Il est alors rappelé que les reliques ne peuvent faire l’objet d’un commerce sous peine de simonie et que par conséquent elles doivent être offertes et non vendues.