« Aimez vos ennemis. »
Ces mots sont forts. Ils sont même provocants. Ils provoquent un sursaut, un cri du cœur : « Jamais ! Comment me demander cela ?! » ou au minimum une vrai réticence de fond. D’abord parce qu’on ne comprend pas vraiment ce que veut dire « aimer ». Ce n’est pas de l’ordre du sentiment. On peut légitimement éprouver une répulsion ou du ressentiment profond pour ceux qui nous ont blessés ou qui font du mal. Jésus explicite : « Faites du bien à ceux qui vous haïssent. Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent, priez pour ceux qui vous calomnient. » Au-delà de ce qu’on ressent, il y a ce qu’on décide de faire et de vouloir. Répondre au mal par le bien, c’est la seule façon de vaincre ce mal. C’est le seul rempart contre la haine qui pourrait m’envahir. C’est la seule façon de suivre Jésus. Il a aimé ses ennemis. Non pas comme il a aimé St Jean ou Lazare, ses amis. Mais il a donné sa vie et prié pour ceux qui le mettaient à mort ou qui réclamaient son supplice. Il voulait les sauver, eux-aussi : « Prendrais-je donc plaisir à la mort du méchant – oracle du Seigneur Dieu –, et non pas plutôt à ce qu’il se détourne de sa conduite et qu’il vive ? » (Ezechiel 18, 23). C’est là la vraie victoire sur le mal : non pas la destruction du pécheur, mais sa conversion (qui n’exclue pas la sanction éventuellement nécessaire). C’est notre amitié avec Jésus qui nous donnera – bien au-delà de ce qui nous semble humainement possible – cette charité qui veut sauver, cette charité qui espère et patiente, sans jamais nier ni relativiser le mal qui est à l’œuvre.
Abbé GROSJEAN, curé
Edito du 24.02.2019